La série western À l’aube de l’Amérique est-elle tirée d’une histoire vraie ?

Joanna Mutton
Isaac braque quelqu'un avec son pistolet dans À l'aube de l'Amérique

Le nouveau drame western de Netflix présente des moments cruels et horrifiques, mais s’ancre aussi dans une Histoire bien réelle : on vous explique tout sur les inspirations de la série À l’aube de l’Amérique.

S’inscrivant en 1857, la nouvelle mini-série de Netflix offre une vision brutale de la question des frontières dans un pays occupé par plusieurs populations différentes. Entre mutilations, vies perdues ou enlèvements, les scènes qui paraissent dans les épisodes sont souvent crues, et font de la série une œuvre réservée à un public averti.

Il est assez clair que certains moments font écho à des événements emblématiques de l’Histoire de la conquête de l’Ouest, dans tout ce qu’elle a de violent pour les camps qui s’opposent et cherchent à l’emporter au détriment des autres. Mais à quel point un tel récit dépeint-il une histoire vraie ? On vous dit tout sur les détails horrifiques qui ont inspiré À l’aube de l’Amérique.

Attention : la suite de cet article contient des éléments susceptibles de spoiler la série À l’aube de l’Amérique.

À l’aube de l’Amérique s’appuie-t-elle sur une histoire vraie ?

À l’aube de l’Amérique est décrite comme un “récit romancé qui explore le choc brutal des cultures, des religions et des communautés“, la majorité des personnages et des événements ayant été inventés pour la série.

Mais elle s’inspire pour cela de récits historiquement fondés, notamment grâce à la participation de la spécialiste Julie O’Keefe, consultante sur la culture des natifs américains et de l’époque concernée par la série Netflix. Ainsi, certains détails concernant des lieux ou des figures historiques sont bien réels.

On peut ainsi citer la tuerie de l’épisode 1, qui n’aura pas manqué de choquer de nombreux spectateurs en éliminant sans prendre de gants tout un camp de voyageurs : l’incident est en réalité inspiré d’un événement bien réel et documenté, le Massacre de Mountain Meadows.

Explication du Massacre de Mountain Meadows

L’un des moments les plus brutaux et sanglants d’À l’aube de l’Amérique apparaît dès le premier épisode, alors qu’une séquence reprend le vrai massacre de Mountain Meadows, survenu entre le 7 et le 11 septembre 1857.

Sara et son fils dans le massacre de Mountain Meadows dans À l'aube de l'Amérique

L’événement a entraîné la mort d’au moins 120 hommes, femmes et enfants, et a presque déclenché une guerre entre l’armée des États-Unis et l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, alors dirigée par Brigham Young.

Les mormons, se considérant comme victimes de persécutions religieuses et pensant qu’un conflit sanglant avec le gouvernement américain était inévitable, ont commencé à harceler les groupes de migrants et voyageurs empruntant les routes en direction de l’Utah : nombreuses sont les personnes à avoir été dépouillées de leurs biens et de leurs provisions, dans le but d’affirmer un certain contrôle des Mormons sur leur territoire.

Dans un contexte propice au conflit, la situation a atteint un point de tension extrême et culminé avec le massacre de Mountain Meadows, le convoi Baker-Fancher se faisant attaquer à 80 kilomètres environ de la frontière de l’Utah, lors d’une halte sur le Spanish Trail (soit “la piste espagnole“).

Dans la série, c’est une milice mormone qui lance l’assaut en invitant des païutes à participer pour se couvrir. Les faits réels seraient plus complexes et beaucoup de sources se contredisent, mais il ressort généralement que natifs américains comme mormons aient participé au massacre.

L’enquête de l’armée américaine sur le massacre

L’attaque a eu lieu après un premier assaut suivi d’un siège du campement : pour s’assurer une victoire totale, les agresseurs ont trompé les émigrants avec une fausse proposition de reddition.

Brigham Young et jim Bridger dans À l'aube de l'Amérique

Le 11 septembre, les miliciens mormons ont en effet proposé aux survivants de prendre en charge les blessés et de les escorter jusqu’à la frontière du territoire pour les protéger des natifs américains, à condition qu’ils rendent les armes. Les émigrants ont accepté et ont suivi la piste, avant de se faire prendre en embuscade par quelques 200 combattants en tout.

Brigham Young, le dirigeant de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours et gouverneur de l’Utah, aurait tenté de dissuader les siens de lancer une attaque sur les caravanes traversant le territoire, mais son message serait arrivé bien trop tard, le messager devant parcourir un millier de kilomètres aller et retour. D’autres sources affirment à l’inverse que l’homme politique aurait plutôt encouragé l’idée de l’assaut.

Brigham Young a bien existé

Brigham Young (interprété par Kim Coates) est une vraie figure historique, présentée comme un dirigeant religieux mais aussi homme politique américain : il a été le deuxième président de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours.

Brigham Young tient un livre contre lui dans À l'aube de l'Amérique

Dans À l’aube de l’Amérique, Young est présenté comme un antagoniste et un fanatique religieux. Il se lance dans une mission pour prendre le contrôle de Fort Bridger et ordonne même à ses hommes de mettre en scène une attaque contre un groupe de voyageurs, y compris d’autres mormons, lors du massacre de Mountain Meadows.

Netflix le décrit comme “un homme prêt à tout pour assurer la survie de ses fidèles persécutés — y compris en utilisant son armée mormone, la Légion de Nauvoo.

Dans la réalité, Brigham Young était aussi influent que controversé. Fondateur de Salt Lake City qui est devenue le centre de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, il a aussi été le premier gouverneur du territoire de l’Utah.

En parlant de son interprétation du personnage, Kim Coates a déclaré [via Tudum] : “J’ai parlé à deux personnes de mon entourage personnel avec qui j’ai un lien, et qui sont membres de longue date de l’Église mormone. Elles m’ont ouvert leurs portes et partagé leurs connaissances avec générosité. Ça m’a aidé à me sentir plus proche de cet homme auquel je ne ressemble absolument pas dans la vraie vie. Je voulais tout savoir sur Young, et ça a parfois été un voyage difficile.

Mais l’interprète de Young était prêt à jouer un dirigeant aussi clivant : “En tant qu’acteur, vous devez faire des choix. Les choses sont décidées au sommet et se répercutent en cascade, et nous ne devons fuir ni la cruauté ni la bonté de notre histoire. Et cette histoire en particulier offre un peu des deux, il y a des leçons à en tirer. Mais, mon dieu, que c’était difficile de survivre en 1857. Je ne sais pas comment les gens y arrivaient.

La minutie dans les détails de la série À l’aube de l’Amérique

Au-delà des faits et figures historiques, À l’aube de l’Amérique propose de nombreux détails très proches de ce qu’on sait de l’époque en question, notamment grâce aux conseils de consultants sur la production.

Des natifs américains païutes dans À l'aube de l'Amérique

Julie O’Keefe, consultante sur les populations autochtones et conseillère du projet, a joué un rôle majeur dans la démarche qu’a la série de rendre hommage à une période bien réelle. C’est ce qu’explique Peter Berg, réalisateur et producteur exécutif auprès de Tudum : “Julie était là chaque jour pour s’assurer que tout était juste — que les coiffures étaient correctes, les bijoux authentiques, les vêtements appropriés, les langues fidèles, et les comportements conformes à l’époque et aux Nations concernées.”

Le réalisateur poursuit : “Je connaissais mes lacunes, et son aide a été extrêmement précieuse pour tout faire correctement. Nous sommes très conscients de l’importance d’honorer tous ces groupes, comme de la nécessité dans l’exactitude de nos recherches et représentations.

Une partie du travail de Julie O’Keefe a ainsi consisté à s’assurer que “le réalisateur et tous les départements disposent d’informations précises, afin que les différentes cultures tribales ne soient pas déformées ou mélangées pour créer ce qui se serait apparenté à un mélange incohérent n’ayant rien à voir avec la tribu représentée.

La série À l’aube de l’Amérique moins violente que la réalité

Pour Julie O’Keefe, la série À l’aube de l’Amérique est néanmoins loin d’être assez violente pour représenter la réalité.

Le massacre de Mountain Meadows dans À l'aube de l'Amérique

Ce n’est pourtant pas faute d’avoir fait preuve de précision, la consultante expliquant qu’elle n’a pas été seule pour trancher : “J’ai fait lire le scénario à des experts sur les clans pour qu’ils donnent des conseils sur les éventuelles modifications à apporter au scénario. Lorsque des langues autochtones étaient utilisées ou modifiées, ça se faisait généralement sur le plateau.

À l’aube de l’Amérique fait ainsi preuve d’une grande minutie dans les détails et son traitement des moments historiques, mais elle n’en reste pas moins une série fictive et romancée. Julie O’Keefe n’hésite d’ailleurs pas à affirmer que la cruauté qu’on retrouve dans les épisodes n’est pas suffisante pour dépeindre la réalité des faits : “Après avoir lu des récits historiques sur ce qui est arrivé aux peuples autochtones à cette époque, on peut dire que la violence dans À l’aube de l’Amérique est modérée.

À l’aube de l’Amérique est disponible sur Netflix depuis le 9 janvier 2025. Et pour d’autres contenus, vous pouvez aussi jeter un coup d’œil à la liste des films et séries qui sortent en streaming ce mois-ci, toutes plateformes confondues.